Cluses avec ses 17 790 habitants est une véritable ville dortoir. « Voiture, boulo, dodo » : cela peut sembler « dur » mais il faut reconnaître que la vie quotidienne est plongée dans une atmosphère d’ennui et de monotonie.
Depuis 2001, l’association M.A.C.A.D.A.M réjouissait la ville avec le très bon festival « Musique en stock ». Au cœur du centre-ville, sur la place des Allobroges, cet événement gratuit offrait une gamme d’artistes des plus sympathiques comme, entre autres, La Ruda Salska (2002), Nada Surf (2003), Dub Incorporation (2007), Ezekiel (2015), Le Peuple de l’Herbe (2010)…
Pendant trois à quatre jours, le centre-ville profitait d’une ambiance familiale et populaire, avec des conférences, des expositions de bande dessinée comme Zep en 2006 ou encore Mezzo en 2013.
À cela s’ajoutait l’éphémère « Radio Lucien », de même que la scène dite de « La Plage » qui permettait aux petits groupes locaux comme nationaux de se faire connaître. D’ailleurs ce tremplin était de renommée nationale.
Mais, depuis 2016, la ville de Cluses en a décidé autrement : fin des subventions et arrêt complet de l’événement.
Aussi, pour ne pas sembler renforcer le caractère de « ville dortoir », la municipalité organise un substitut d’une toute autre nature, le NRJ Music Tour.
Pour l’autorité municipale, l’offre musicale répondrait mieux aux « désirs de la ville », alors même que Musique En Stock réunissait plus de 45 000 visiteurs.
Or, le NRJ Music Tour n’est ni plus, ni moins, qu’un festival de variété française des plus médiocres qui se déroule au parvis des Esserts.
La première déclinaison en 2018 a par exemple fait monter sur scène les chanteuses Nakamura et Jenifer et l’édition du 14 septembre 2019 voit se produire Jérémy Frerot, Black M, Bilal Hassani…
Disons le clairement : c’est un désastre culturel, un divertissement insipide à coup de musiques qui tournent déjà en boucle à la radio.
Doit-on se laisser coincer entre les festivals décadents des stations huppées d’altitude et les concerts sans âmes et abrutissants du bas de vallée ? Devons-nous accepter passivement cette condescendance intolérable qui veut que « les gens » ne pourraient pas accéder à un haut niveau culturel ?
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C’est à travers ces questions que l’on voit le gouffre qui sépare la Gauche, celle du combat ouvrier émancipateur, et les notables gestionnaires souvent issus de la Droite et du Centre.

À Gauche, l’objectif politique est depuis toujours l’élévation du niveau intellectuel et culturel des gens en refusant la médiocrité, la passivité et le conformisme ambiant.
C’est là une des clefs pour réaliser l’égalité et l’émancipation de toutes et de tous : c’est ce que remplissait, en partie, Musique en Stock malheureusement troqué par le NRJ Music Tour…
Salut Arve à Gauche,
Je suis, dans la plupart des cas, entièrement d’accord avec vos positionnements.
Ici, bien que je comprenne et acquiesce le fond de l’article (c’est culturellement bien malheureux de remplacer Musique en Stock par un NRJ Music Tour, qui de surcroît a lieu au parvis des Esserts), je trouve l’argumentaire un peu subjectif et limite méprisant.
Je ne suis pas une fan de Black M, de Bilal Hassani ni d’Aya Nakamura. Mais beaucoup de nos jeunes ados le sont. Bilal Hassani est même devenu un symbole émancipateur pour certains. Les groupes que vous citez en « référence culturelle acceptable » sont des groupes de ska, dub, etc. qui plaisent à un certains public mais pas à d’autres. Pourquoi cliver ainsi les genres, et du même coup les populations ? L’idéal ne serait-il pas d’avoir un festival ou Aya Nakamura chanterait à côté d’EZ3kiel ?
Il faut faire attention à ce genre de mépris culturel : si vous considérez qu’il existe « un haut niveau culturel », vous hiérarchisez de fait un domaine -la culture – ce qui n’a rien ni de gauche, ni d’émancipateur. Elever le niveau intellectuel et culturel ? Mais qu’est-ce qu’une « bonne/haute » culture ? Qu’est-ce qu’être intelligent ?
Ce qui est important, c’est faire du lien, pas cliver.
Merci de m’avoir lue.
Pour le reste, continuez !
Cloé
Salut Cloé,
Merci pour ton commentaire ! Comme tu t’en doutes, notre propos n’est pas du tout d’être méprisant vis-à-vis des jeunes de Cluses, dont certains écoutent ces artistes.
Seulement, nous pensons qu’il ne faut pas être dupe de ces grandes productions culturelles commerciales, complètement délavées dans leur contenu. Bien sûr que nous « hiérarchisons », nous ne mettons pas sur le même plan des artistes qui conservent une certaine indépendance culturelle, qui ont une démarche cultuelle authentique, par rapport à ceux dont la musique est formatée de bout en bout par l’industrie musicale et les monstres capitalistes comme NRJ.
Pour comparer, ce genre de production musicale est selon nous aussi insipide qu’un pot de Nutella. Les jeunes pensent peut-être « aimer » ça, mais notre rôle, ce que nous pensons être le rôle de la Gauche, c’est de porter autre chose, de porter une alternative sur le plan culturel. Autant en ce qui concerne le pot de Nutella, que les grosses productions musicales d’NRJ !
Au plaisir de te lire, le débat contradictoire est source de progrès,
Arve à Gauche.
Bonjour, il est clair que Cluses est une ville dortoir c’est indéniable et je ne contredirai jamais personne là dessus.
Concernant les NRJ Music Tour de 2018 et 2019 je suis content qu’ils aient eux lieu chez nous et je préfère largement une journée dans l’année avec des artistes dont je peux chanter les chansons que 4 jours avec des semi-inconnus, j’ai 27 ans personnellement et autour de moi il n’y avait pas seulement des ados mais des personnes de plus 50 ans qui s’amusaient aussi bien que les plus jeunes. D’habitude à Cluses les gens sont plutôt coincés et ne se lâche pas mais là le festival à fait l’unanimité sur l’ambiance. Bien que n’étant pas fan de tout les artistes j’ai pu largement me défouler pendant ces 3h de temps !
Quand Musique en Stock avait lieu en y allant je me sentais mal à l’aise car il y avait clairement des gens qui venait pour se bourrer la gueule et fumer certains produits illicites ce n’était absolument plus familial vu l’état dans lequel ils finissaient au milieu de la foule.
Pendant le NRJ Music Tour l’accent a été mis sur la sécurité et c’est une grande réussite puisque je n’ai vu aucun débordement ni certaines pratiques cité précédemment.
Cordialement,
Jeremy
PS : Merci à monsieur le Maire de Cluses de tout avoir organiser, malheureusement je ne le croise pratiquement jamais car sinon je lui aurais dis de vive voix.
Bonjour Jérémy,
Merci pour ta remarque qui permet d’éclairer le sujet.
Tout d’abord, nous sommes entièrement d’accord avec toi pour dire que les drogues (alcool compris) pourrissent bien trop souvent les festivals et les soirées en général et il serait temps d’avoir des festivals « alternatifs » où l’amusement, le divertissement et la culture passent ailleurs que par une sorte défouloir morbide (avec donc des bars sans alcools).
Quant à ta remarque sur le NRJ Tour, nous comprenons bien ce que tu dis et c’est pour cela qu’il y a tout de même une certaine affluence à ce festival et loin de nous de « critiquer pour critiquer » comme tu t’en doutes. Notre but est plutôt de participer à quelque chose de constructif.
Or, et tu es d’accord avec nous là-dessus, Cluses (comme bien d’autres villes de la vallée) est une ville dortoir. Les offres culturelles sont tellement faibles, pauvres et/ou en décalage avec nos besoins qu’il y a une sorte de contentement artificiel qui se créée dès que quelque chose d’un peu « populaire », « massif » s’organise par ici. On se sent bien obligé de se contenter de ce que l’on a…
Il est évident que, lorsqu’il n’y d’habitude presque rien, on s’amuse plus facilement sur des artistes que l’on entend en permanence à la TV, la Radio, sur les réseaux sociaux… Mais la culture ce n’est pas ça, ce n’est pas rester au « ras » de notre quotidien justement, c’est plutôt s’élever, s’émanciper réellement d’un quotidien monotone et ennuyeux.
N’avons-nous pas droit aussi à un festival populaire et massif avec des artistes digne de ce nom ou sommes-nous contraints à accepter, à chaque fois, des divertissements au rabais ? Ce genre de festivals est-il réservé à un petit milieu d’initiés ? Aux artistes et autres « branchés » des grandes villes ?
Cordialement,
Arve à Gauche.